Denonciations calomieuses

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Les articles 226-10 à 266-12 du code pénal définissent cette infraction de la manière suivante : la dénonciation, effectuée par tout moyen et dirigée contre une personne déterminée, d’un fait qui est de nature à entraîner des sanctions judiciaires, administratives ou disciplinaires et que l’on sait totalement ou partiellement inexact, lorsqu’elle est adressée soit à un officier de justice ou de police administrative ou judiciaire, soit à une autorité ayant le pouvoir d’y donner suite ou de saisir l’autorité compétente, soit aux supérieurs hiérarchiques ou à l’employeur de la personne dénoncée, est punie de cinq ans d’emprisonnement et de 45000 euros d’amende.
Sommaire
Comment et sous quelle forme se traduit une dénonciation calomnieuse ?
Le texte est très large sur ce point. La dénonciation peut être faite sous une forme quelconque, verbale ou écrite. Les cas sont nombreux : lettre missive, déclarations, citation directe, mémoire de justicen. La dénonciation par support écrit ne doit pas nécessairement être signée ou rédigée par son auteur.
Il n’est pas nécessaire que la dénonciation soit dirigée contre une personne expressément désignée, il suffit que la ou les personnes visées soient identifiables.
Elle peut être faite de manière accessoire.
Un exemple récent illustre cette situation. Cette infraction a été retenue à l’encontre d’une personne qui avait simplement joint à son courrier une lettre calomnieuse d’un tiers (Cour de cassation ch. crim. 26 juin 2007)
La dénonciation doit être spontanée.
Elle doit être le fruit de la volonté libre de son auteur. C’est un critère essentiel. Il n’y a pas de dénonciation calomnieuse lorsque une personne répond aux questions qui lui sont posées.
Concrètement le législateur a voulu exclure du champ d’application de ce texte tous ceux qui répondent à des demandes de renseignements adressées par des officiers de police judiciaire et administrative.
Par exemple : Le témoin qui dépose devant une juridiction de jugement ou d’instruction ou le fonctionnaire chargé de réaliser une enquête et cela même s’il insère des dénonciations mensongères
Une particularité relative à la constitution de partie civile dans le cadre d’une procédure pénale : la partie civile qui se joint à l’action du ministère public ne commet pas de dénonciation spontanée. Au contraire, la partie civile qui prend l’initiative des poursuites en mettant en mouvement l’action publique agit spontanément et tombe sous le coup du texte.
Quel destinataire ?
La loi de 1943 a modifié substantiellement cet élément de l’infraction.
Auparavant, seules étaient visées les dénonciations adressées aux officiers de justice ou de police administrative ou judicaire.
Cette limitation n’existe plus, la définition étant maintenant beaucoup plus large : soit un officier de justice ou de police administrative ou judiciaire, soit à une autorité ayant le pouvoir d’y donner suite ou de saisir l’autorité compétente, soit aux supérieurs hiérarchiques ou à l’employeur de la personne dénoncée.
Qu’est ce qui est punissable ?
Ce n’est pas la simple calomnie en tant que telle. Le texte est strict sur ce point.
Tout d’abord, il faut que le fait dénoncé soit de nature à entraîner des sanctions pénales, administratives ou disciplinaires (il s’agit d’une différence notable avec la diffamation).
Ensuite, le fait dénoncé doit être totalement ou partiellement inexact.
La dénonciation d’un fait rigoureusement exact n’est pas punissable.
Néanmoins, le fait vrai mais dénaturé par l’auteur ou présenté sous des apparences trompeuses en y ajoutant des circonstances inexacts ou tout simplement en exagérant la portée des faits peut tomber sous le coup de l’infraction.
S’agissant d’une infraction pénale, l’auteur doit avoir conscience de commettre l’acte répréhensible. La mauvaise foi du dénonciateur doit être établie (différence avec la diffamation).
Elle consiste dans la connaissance de la fausseté des faits dénoncés ou tronqués.
Il n’y pas d’intention, dans la mesure où le dénonciateur a eu des raisons de croire à l’existence des faits dénoncés. Il en est de même d’un dénonciateur mu par la témérité ou une légèreté certaine.
Comment sont appréciés les faits répréhensibles ?
L’article 226-10 alinéa 2 du code pénal prévoit une présomption de culpabilité dans certaines hypothèses interprétées de manière très restrictive.
La fausseté du fait dénoncé résulte nécessairement de la décision, devenue définitive, d’acquittement, de relaxe ou de non-lieu déclarant que la réalité du fait n’est pas établie ou que celui-ci n’est pas imputable à la personne dénoncée.
En dehors de ces cas, le tribunal saisi de l’affaire retrouve son pouvoir d’appréciation. 
L’article 222-12, en tout autre cas, le tribunal saisi des poursuites contre le dénonciateur apprécie la pertinence des accusations portées par celui-ci.
La Cour de cassation est très vigilante sur le caractère limitatif des cas visés par le texte.
Observations relatives aux poursuites, à la répression et à l’action civile
Il s’agit d’un délit, compétence tribunal correctionnel du lieu du délit (lieu d’établissement du destinataire) ou résidence du dénonciateur.
Répression : 5 ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende.
Prescription de trois ans dont le point de départ est au jour de la dénonciation est parvenue à l’autorité destinataire.
Le tribunal doit surseoir a statuer lorsque les fait dénoncés ont donné lieu à des poursuites pénales toujours en cours (article 226-11 du code pénal – application autonome par rapport à l’article 4 du NCPP).
Il s’agit aussi d’une hypothèse de suspension de la prescription.
Enfin, l’action pénale n’est pas exclusive d’une action civile par constitution de partie civile mais également devant les juridictions civiles dont le fondement sera bien entendu l’article 1382 dont le régime est différent de l’infraction notamment au niveau du caractère répréhensible de la dénonciation.